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L’Eglise doit-elle être une démocratie ?

17 mars 2011

On entend souvent revendiquer que l’Eglise doit se démocratiser. Un article d’opinion, paru dans « La Libre Belgique », apporte un éclairage intéressant sur la question.

 

 

L’actualité, que ce soit celle d’Egypte, de Libye, ou de notre plat pays qui n’en finit pas de se chercher un gouvernement, nous incite à méditer sur le pouvoir, sur sa légitimité et son exercice.

A cet égard, il est piquant de constater que notre Souverain, à qui un certain président de parti reproche de ne pas avoir été élu, s’avère un rouage indispensable à la bonne marche de nos institutions démocratiques.

Tandis que des régimes se lézardent et s’écroulent comme des châteaux de cartes, certains se tournent vers la seule institution qui a survécu aux tempêtes de ces deux derniers millénaires pour lui reprocher son mode de fonctionnement. Ainsi, dans une opinion exprimée ce mardi 8 février [1], il est proposé à l’Eglise de s’adapter, de retourner à l’Evangile et de mettre entre parenthèses sa hiérarchie. Vaste programme !

D’emblée, notons que le débat n’est pas de savoir, en règle générale, quel est le mode de gouvernement le plus parfait. Sur ce point, le modèle démocratique, en tant que forme d’organisation politique où le peuple est souverain, constitue à ce jour l’idéal le plus élevé et le plus conforme à la dignité de la personne humaine. En réalité, le cœur du débat concerne l’identité de l’Eglise. Est-elle une réalité fondée par les hommes ? Ou bien est-elle une réalité voulue par Dieu ? Dans le premier cas, l’Eglise serait une organisation que les hommes façonnent à leur convenance. Inévitablement, elle s’avère un lieu de pouvoir où les factions s’opposent, de manière plus ou moins démocratique. Dans le second cas, l’Eglise est une réalité reçue à la manière d’un don, celui de la Révélation. C’est la foi des chrétiens : Dieu se révèle à travers Jésus-Christ. Alors que dit ce Jésus sur l’Eglise ?

Premier constat : nous remarquons, parmi les disciples du Christ, l’existence d’une hiérarchie dont l’objectif est l’exercice d’un ministère. Ainsi, dans l’Evangile selon saint Matthieu (28, 18-20), on lit que le Christ s’adresse aux Onze (aux Douze moins Judas qui s’est pendu) en ces termes : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc, de toutes les nations, faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous pour toujours jusqu’à la fin du monde. »

Sans s’étendre davantage sur la question : d’autres passages mentionnent un mandat donné par le Christ à ses Apôtres (Jn 20, 21-22 ; Mc 16, 15 ; Lc 24, 49 ; Jn 14, 16). Comment les intéressés ont-ils compris ces instructions ? A la lecture des Actes (1, 15), l’on note que les Douze ont la conscience de constituer un groupe à part. Ils administrent les sacrements et prêchent la Parole de Dieu ; rassemblent les fidèles ; se réunissent en concile et prennent des décisions. Ils s’entourent d’auxiliaires et nomment des successeurs. A ces derniers, ils transmettent le pouvoir qu’ils ont eux-mêmes reçu, à travers un rite précis (1 Tm 4, 14 et Tt 1, 5).

Par ailleurs l’Eglise, au cours des siècles, ne peut-elle rien modifier à son organisation ? Assurément, elle le peut. Par exemple, les modalités de l’élection de l’évêque peuvent fortement varier, d’une époque à l’autre et d’un pays à l’autre. L’évêque de Milan, saint Ambroise, a été placé sur son siège épiscopal par acclamation populaire. Aujourd’hui, c’est le Pape qui nomme la plupart des évêques et, demain, il pourrait en aller autrement.

Mais, en définitive, pourquoi le Christ aurait-Il fondé son Eglise ? Si ce n’est pour perpétuer le salut qu’Il est venu réaliser dans le monde. Et si les hommes avaient dû voter sur la manière dont Dieu devait réaliser leur salut, Jésus-Christ ne serait probablement pas mort crucifié. Et il est encore moins certain qu’ils aient accepté l’eucharistie comme un sacrement. Ce langage est trop fort ! Qui peut l’écouter ? S’indignèrent ses disciples à Capharnaüm. Manifestement, Dieu n’est pas un homme comme les autres !

Vincent Delannoy se définit comme chrétien de base. Il est l’auteur, notamment, de « Ils ont vu Marie » (Ed. de l’Œuvre). Nous le remercions de nous avoir autorisé à publier ce texte, qui est paru dans « La Libre Belgique » du 2-3-11.


[1] Cet article est une réponse à une opinion publiée précédemment dans le même journal.