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La liberté religieuse, un droit de l’homme en péril

21 juillet 2013

La persécution et la discrimination religieuses sont des réalités plus actuelles que jamais. Et pas seulement en-dehors du vieux continent…

 

« Une étude récente est arrivée à une conclusion saisissante : plus de cent mille chrétiens sont tués à cause de leur foi chaque année. D’autres sont soumis à des déplacements forcés, à la destruction de leurs lieux de culte, au viol et à l’enlèvement de leurs dirigeants », comme c’est arrivé récemment dans le cas des évêques orthodoxes Yohanna Ibrahim et Boulos Yaziji, à Alep en Syrie, a affirmé l’archevêque Silvano Tomasi, observateur permanent du Saint-Siège aux Nations Unies, durant la 23ème session du Conseil des Droits de l’Homme initiée le 28 mai dernier.

Fernand de Haro, dans son nouveau livre intitulé Cristianos y leones (Chrétiens et lions, Planeta, Barcelone 2013), affirme la même chose : chaque année, cent mille chrétiens sont assassinés dans le monde. Haro rappelle qu’en 2001, David B. Barret et Todd M. Johnson ont publié le rapport World Christian Trends, dans lequel ils expliquent qu’entre 2000 et 2005, la moyenne annuelle de chrétiens tués à cause de leur religion fut de 160 000. En 2010, le nombre est descendu à 100.000. On doit cette diminution à la signature de la paix au sud Soudan en 2005. Actuellement, 75 % des personnes qui souffrent de discrimination religieuse sont chrétiennes. D’après des renseignements du Pew Research Center (Washington) datant de janvier 2013, cent millions de chrétiens sont persécutés de par le monde. D’après Haro, le christianisme constitue un frein au pouvoir universel des dictatures qui pénalisent l’exercice du droit à la liberté religieuse.

Géographie de la violence contre les chrétiens

L’ouvrage Cristianos y leones passe en revue les pays où la liberté religieuse est la plus transgressée. Au Proche-Orient, on observe un processus croissant de radicalisme islamique qui menace la sécurité des chrétiens. En Irak, on compte 180.000 chrétiens sur un total de 31 millions d’habitants. Depuis 2003, 2.000 chrétiens ont été assassinés à cause de leur religion. De 2003 à 2012, 650.000 chrétiens ont émigré du pays. Les conséquences de la guerre de 2003 ont été funestes pour la communauté chrétienne implantée depuis 2.000 ans dans la région.

En Egypte, la montée au pouvoir des frères musulmans en 2012 a affecté négativement la sécurité des citoyens de confession chrétienne. Pour Haro, le respect des chrétiens coptes en Egypte sera décisif pour la survie de la démocratie dans ce pays.

Au Pakistan, avec une population de 184 millions d’habitants dont 4 millions sont chrétiens, il y actuellement 993 accusés sur base de la loi contre le blasphème, dont 120 chrétiens. Shahbaz Bhatti, ministre des minorités religieuses, fut assassiné le 2 mars 2011 après avoir tenté de supprimer cette loi et de défendre les chrétiens comme Asia Bibi. Au printemps 2009, après avoir été harcelée par quelques voisines pour se convertir à l’islam, Asia leur dit : « Je crois que Jésus-Christ s’est sacrifié sur la croix pour les péchés du monde. Qu’a fait votre prophète Mahomet pour sauver les hommes ? » Suite à cela, elle a été dénoncée à un imam, mise en prison, condamnée à mort, mais pas encore exécutée.

Au Nigeria, avec 73 millions de chrétiens sur un total de 160 millions d’habitants, en 2011, le groupe terroriste islamique Boko Haram a assassiné 550 personnes. En janvier 2012, il y eut un attentat à l’église de Sainte Thérèse de Madalla, où sont mortes 40 personnes. En Inde, avec 1,16 milliards d’habitants, dont 230 millions sont chrétiens, il y a une augmentation du terrorisme d’origine nationaliste hindou. En août 2008, plus de 500 chrétiens furent assassinés à Bhubaneshwar, dans l’état d’Orissa.

En Chine, où vivent 115 millions de chrétiens dans une population de 1,139 milliards habitants, c’est le parti communiste qui fustige l’Eglise catholique. Après qu’on ait tué son prédécesseur Fan Xueyan, Su Zhimin, évêque de Boading, aujourd’hui emprisonné, a demandé aux autorités d’investiguer sur les graves violations contre les droits civils et que soient garantis les droits de beaucoup de croyants. Le rapport de l’Aide à l’Eglise en Détresse de 2012 énumère les violations à la liberté contre la hiérarchie catholique et le peuple chrétien. Malgré cela, dans les 60 dernières années, les catholiques se sont multipliés par quatre.

Défense et portée de la liberté religieuse

La liberté religieuse n’est pas seulement un droit de l’homme qu’il faut défendre mais bien un besoin des nations pour leur propre sécurité et survie. C’est l’idée centrale du livre Religious Freedom. Why Now ? Defending an Embattled Human Right (Liberté religieuse. Pourquoi maintenant? En défense d’un droit de l’homme en péril, The Witherspoon Institute, Princeton 2012) publié par Timothy Shah, Professeur à l’Université de Georgetown (USA). Dans ce livre, un groupe d’experts défend l’idée que la liberté religieuse se situe au noyau de la dignité humaine, de la démocratie et de la paix mondiale. Ils affirment que « la répression religieuse tend à fomenter la violence, l’instabilité, la tyrannie, la stagnation économique et l’oppression de la femme ».

D’après l’ouvrage cité, l’essor du fondamentalisme islamique découle de l’identification de la politique et de la religion. Dans ce contexte, certains groupes qui prennent le pouvoir veulent contraindre les autres à une interprétation religieuse unique. Les premières victimes de ce fondamentalisme sont de larges secteurs de la population musulmane. En outre, paradoxalement, il existe une relation entre le terrorisme islamiste et le manque de liberté religieuse. Toutefois, cette étude rejette l’idée que l’islam présente une incapacité intrinsèque à se rendre compatible avec la liberté religieuse et la démocratie libérale : « De nos jours, il y a toujours plus de penseurs musulmans qui utilisent les arguments du Coran pour défendre la liberté religieuse depuis une perspective islamique ». Le livre traite aussi du problème des atteintes à la liberté religieuse dans les démocraties occidentales.

Le Pacte International de Droits Civils et Politiques, approuvé par l’Assemblée Générale des Nations Unies en 1966 et ratifié en 2010 par la grande majorité des pays du monde, consolide l’article 18 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme sur le droit à la liberté religieuse. 83 % des pays ayant une population d’au moins deux millions d’habitants offrent des garanties constitutionnelles de liberté religieuse, et 8 % supplémentaires s’engagent à préserver une telle liberté. Seulement 9 %, à savoir 13 pays, ne reconnaissent pas formellement ce droit. Malgré tout, comme nous l’avons vu plus haut, les persécutions pour des motifs religieux atteignent des dimensions intolérables.

Mesures discriminatoires en Europe

En Occident, où l’on se pique de défendre la démocratie et les libertés, il y a aussi des lois et des pratiques qui limitent la liberté religieuse. Un rapport de l’Observatoire sur l’Intolérance et la Discrimination fut présenté le 21 mai dernier lors d’une Conférence de haut niveau de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) à Tirana en Albanie, à l’occasion d’une communication présentée par la Directrice de l’Observatoire, Gudrun Kugler.

L’étude relève 41 cas de lois nationales aux conséquences négatives pour les chrétiens dans plus de 15 pays européens. En outre, on y renseigne 169 cas d’intolérance contre les chrétiens dans l’Union Européenne. Le rapport est constitué de deux parties : la première analyse les limitations à la liberté qui affectent les chrétiens d’Europe, et la seconde, les cas les plus criants d’intolérance et de discrimination en Europe en 2012.

Les problèmes concernent cinq aspects fondamentaux qui ne sont pas simplement religieux :

— La liberté de conscience : on explique qu’il ne s’agit pas d’une question exclusivement religieuse, et qu’elle peut être appliquée non seulement aux personnes mais aussi aux institutions. L’objection à l’avortement et à la distribution de contraceptifs représente un sérieux problème pour les professionnels de la santé qui s’opposent à ces pratiques dans différents pays.

— La liberté d’expression : elle se heurte à de sérieuses entraves lorsque quelqu’un refuse de comprendre l’homosexualité comme une pratique normale et sans objection éthique. Une critique dans ce sens peut faire l’objet d’une enquête criminelle. De même, les critiques publiques contre l’islam présentent actuellement des risques pour les citoyens.

— La liberté de réunion et d’association : ce qui frappe, par exemple, c’est le manque de tolérance aux manifestations pacifiques pour la vie devant les cliniques qui pratiquent l’avortement. D’autre part, on constate d’authentiques manifestations de haine contre des institutions chrétiennes.

— Les politiques d’égalité : certaines ne respectent pas les marques d’identité des institutions. Au Danemark, par exemple, les autorités ont obligé l’Eglise Evangélique à célébrer des mariages homosexuels dans leurs lieux de culte.

— Les droits des parents face à l’éducation de leurs enfants : les parents se trouvent face à divers empêchements comme celui des campagnes éducatives favorables à l’homosexualité, où, dans certaines occasions, on prive les parents de la possibilité de choisir que leurs enfants y assistent ou pas. Une autre limitation est l’interdiction faite aux parents d’assurer la formation scolaire de leurs enfants à la maison, pratique interdite dans certains pays tel que l’Allemagne.

L’Observatoire recommande à ceux qui conçoivent les politiques de chercher « un arrangement raisonnable » quand un choc éclate entre les croyances de foi et la loi.

 

José Ignacio Moreno est journaliste, membre du conseil de rédaction de l’agence Aceprensa. Fernando de Haro est également journaliste, pour la radio et la télévision. Source : http://www.aceprensa.com/articles/la-libertad-religiosa-un-derecho-humano-combatido/. Ce texte a été traduit de l’espagnol par Carine Therer.